MARCHÉ DES MÉTAUX
Bilan 2024 et perspectives 2025
BILAN 2024
L’année 2024 aura été volatile(1) pour l’ensemble des métaux. Pénalisé par une situation économique au ralenti en Chine et la décision des Banques Centrales de repousser un peu l’assouplissement des politiques monétaires, le secteur a mal commencé l’année.
Puis, l’annonce par le gouvernement chinois de son intention de soutenir son économie, couplée à la clarification sur le calendrier de baisse de taux par les principales Banques Centrales ont redonné de l’élan au secteur, qui a connu une belle progression pendant l’été.
Mais l’élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis a de nouveau pesé sur les cours. La volonté affichée par Donald Trump d’instaurer des barrières douanières en représailles au dumping commercial des industries chinoises fait craindre un ralentissement économique mondial qui pourrait peser sur la demande de métaux industriels.
Dans ce contexte les métaux précieux, considérés par de nombreux investisseurs comme des valeurs refuge, réalisent une très belle année. L’environnement politique et géopolitique mondial a également incité les investisseurs à rechercher des actifs de protection. L’or signe ainsi sa plus belle progression annuelle depuis 2010, tandis que l’argent a connu une progression à deux chiffres.
Or | +20,30 % |
Argent | +14,55 % |
Palladium | -20,92 % |
Platine | -13,92 % |
Aluminium | +0,70 % |
Cuivre | +0,25 % |
Zinc | +5,85 % |
Nickel | -13,06 % |
Plomb | -11,56 % |
Les performances passées ne préjugent pas des performances futures.
Les performances passées ne préjugent pas des performances futures.
Les métaux industriels sont restés relativement stables au terme de l’année. Certains d’entre eux ont connu une belle progression (cuivre, aluminium, zinc…) mais ont abandonné une grosse partie de leurs gains après l’élection de Donald Trump, et aussi en raison de facteurs plus conjoncturels.
Les performances passées ne préjugent pas des performances futures.
L’année 2025 s’annonce sous le signe de l’incertitude. Deux éléments majeurs décideront de l’ampleur de la performance des métaux. D’abord, la politique menée outre-Atlantique par l’administration Trump. La mise en place des barrières douanières évoquées pendant sa campagne pourrait avoir des conséquences sur le niveau du commerce mondial. Mais des paroles aux actes, il y a… la négociation. Les États-Unis sont un pays fort économiquement, mais pas complètement isolé. La Chine a ainsi commencé à poser quelques jalons pour les discussions à venir, en annonçant notamment en fin d’année dernière des restrictions d’exportation sur un certain nombre de métaux (gallium, germanium, antimoine…) et de technologies (batteries, traitement du lithium…), des suppressions de remises de taxes sur les exportations (aluminium, cuivre…). L’Empire du Milieu est notamment le principal fournisseur (plus de 50 %) des États-Unis pour 16 métaux.
Le résultat des négociations sera donc à surveiller. L’autre élément important sera l’attitude du gouvernement chinois. Celui-ci a indiqué vouloir soutenir son économie, et notamment la consommation, en berne depuis plusieurs trimestres. Les annonces ont d’ailleurs déjà commencé puisque, dans les tout premiers jours de janvier, le gouvernement chinois a annoncé des subventions sur la consommation de produits de grande consommation (téléphones portables, tablettes, montres électroniques, petit et gros électroménager…) et l’amélioration de l’outil industriel (machines agricoles…), mais aussi une prolongation de la prime à la casse, en grande partie responsable de la forte croissance des ventes de véhicules électriques en 2024.
Un tel soutien, s’il est combiné avec une poursuite de la politique de développement du réseau électrique et des technologies bascarbone pourrait à lui tout seul pousser nombre de métaux dans une situation d’offre insuffisante. Sur ce point, il est à noter que, dans les tous premiers jours de janvier, la Chine a indiqué qu’elle souhaitait même accélérer la modernisation de son réseau et qu’elle y consacrerait en 2025 un budget de 89 milliards de dollars, contre 80 l’an passé.
Rappelons que, malgré le ralentissement du secteur immobilier, la demande de métaux est restée très dynamique dans les autres secteurs d’activité. Nous observons d’ailleurs un découplage de plus en plus important entre la consommation des métaux nécessaires à la transition et l’activité économique globale, rendant globalement le secteur moins sensible à un ralentissement économique si la transition poursuit son développement.
Cela nous conduit à être très positifs pour le secteur pour l’année. La Chine semble avoir pris la décision de parvenir le plus rapidement possible à la neutralité carbone, ce qui soutiendra la demande, et de dynamiser la consommation, ce qui constitue un second facteur positif. Le risque principal réside dans une position dure de Donald Trump et de son gouvernement qui entraînerait une correction importante de l’économie. Mais celui-ci pourrait devoir faire des concessions, notamment à la Chine, ce qui devrait limiter les conséquences économiques de ses décisions. Certains, comme Emmanuel Hache, évoquent même les dépendances croisées entre la Chine et les États-Unis et la possibilité d’une collaboration entre les deux géants au détriment de l’Europe notamment.
CONTEXTE 2025
LA GUERRE COMMERCIALE A COMMENCÉ
Avant même que l’année 2024 ne se termine, la guerre commerciale avait déjà commencé. Le coup de semonce a été lancé par les États-Unis avec l’élection de Donald Trump, qui a rapidement confirmé son intention d’instaurer des barrières douanières visant la plupart des grandes économies mondiales. Mais la réponse ne s’est pas fait attendre. Quelques semaines après, la Chine répliquait avec un certain nombre de mesures. D’abord en annonçant début décembre 2024 qu’elle transformait les restrictions d’exportations mises en place ces derniers mois sur un certain nombre de matériaux (gallium, germanium, antimoine) en interdiction d’exportation directement dirigée vers les États-Unis. Les exportations de graphite seront également soumises à un contrôle plus strict. Ces éléments sont indispensables à l’industrie de la défense et des semiconducteurs. Ces restrictions ont été complétées, début janvier 2025, sur les technologies relatives au traitement du lithium, des batteries et de certains de ses composants (précurseurs de cathode).
Le message est clair… La Chine rappelle à Washington que, si elle dépend des États-Unis pour un certain nombre de technologies, la réciproque est également vraie. Ainsi, dans le domaine des métaux, les États-Unis sont encore dépendants à plus de 50 % pour l’approvisionnement de 16 métaux. Mais surtout, la Chine est le principal fabricant de la quasi-totalité des machines-outils de la chaîne de production des batteries au lithium et du photovoltaïque, rendant difficile le développement de ces secteurs aux États-Unis sans une conciliation avec le gouvernement de Xi Jinping. Cela impliquerait que les États-Unis ne peuvent pas créer une chaîne de production sur leur territoire et que l’instauration de droits de douane entraînerait un renchérissement de l’utilisation de ces technologies sur le sol américain, tout en privant le pays du développement d’industries dont nous pouvons penser qu’elles sont promises à un bel avenir…
Les propos de Donald Trump, le 17 janvier à la suite de son échange téléphonique avec le président chinois, montrent que le président américain prend peut-être conscience de ces éléments progressivement, puisque ses propos étaient beaucoup plus mesurés après cet entretien.
Certains comme Emmanuel Hache, chercheur à l’IFP Énergies nouvelles et directeur de recherche à l’IRIS, spécialiste des énergies et de la géopolitique des ressources naturelles, sont ainsi allés jusqu’à évoquer la possibilité qu’à un moment, cette interdépendance débouche sur un accord de partenariat entre les deux superpuissances au détriment des autres nations.
Les barrières douanières pourraient ainsi faire l’objet de négociations et, finalement, tout comme lors du premier mandat de Donald Trump, être revues à la baisse et surprendre positivement les marchés.
DONALD TRUMP ET LE CLIMAT
Le président américain élu a répété pendant toute sa campagne sa volonté de sortir de l’Accord de Paris et de favoriser les énergies fossiles, qui sont un avantage concurrentiel important pour les États-Unis. Le marché craint également qu’il ne veuille revenir sur l’Inflation Reduction Act (IRA), mis en place par Joe Biden pour soutenir les technologies bas-carbone et que cela provoque un coup d’arrêt à la transition énergétique.
Comme nous l’avons détaillé dans notre dernier flash marchés (lire ici), il est peu probable que Donald Trump mette fin à l’IRA. Outre le fait qu’une telle décision demande une super majorité au Sénat qu’il n’a pas, les États les plus bénéficiaires des mesures économiques et fiscales de cette loi sont républicains. Le plus gros récipiendaire d’aide est l’État du Texas.
Outre ces éléments, de nombreuses voix se sont élevées pour demander au président élu de maintenir un cadre stable et de ne pas revenir sur ces mesures. Parmi les plus remarquées, celle de Darren Woods, PDG d’Exxon, qui bénéficie des subventions de l’IRA pour le développement de technologies de capture et séquestration de carbone et de production d’hydrogène bas-carbone. Le grand patron appelle à ne pas sortir de l’Accord de Paris et à ne pas revenir sur les subventions accordées par l’IRA.
La politique de soutien aux énergies fossiles annoncée par Donald Trump n’est - quant à elle - pas très différente de celle du gouvernement Joe Biden, mais elle est plus assumée. Rappelons que sous la précédente présidence, la production de pétrole a augmenté d’environ 2 millions de barils par jour et que la vice-présidente Kamala Harris a tranché en faveur des pétroliers dans une décision au Sénat visant à octroyer davantage de permis d’exploration aux compagnies pétrolières sur le territoire américain.
Les choses devraient donc assez peu évoluer sur le plan de l’engagement climatique des États-Unis. Une sortie de l’Accord de Paris est toujours possible, mais elle serait essentiellement symbolique. Ce qui est en revanche envisageable, c’est une redistribution des aides au sein de l’IRA. Nous noterons par exemple que Donald Trump est profondément anti-éolien mais a déclaré être « fan du solaire » pendant sa campagne. Il ne faut pas non plus sous-estimer le pouvoir des États, qui forment une fédération et conservent donc une certaine autonomie dans leurs décisions. Ainsi, pendant le premier mandat de Donald Trump, la Californie n’a pas arrêté son expansion dans les secteurs bas-carbone.
L’Amérique veut conserver l’avantage concurrentiel que lui donne sa production de pétrole, mais ce n’est pas nouveau. Ainsi, avant les élections américaines, l’Agence Internationale de l’Énergie (AIE) s’attendait à ce que les États-Unis ne représentent que 9 % de la croissance des capacités de renouvelables installées d’ici 2030. Même si Donald Trump réduit les subventions, l’impact sera limité, en particulier si dans le même temps la Chine décide d’accélérer sa transition. L’Empire du Milieu devrait représenter près de 60 % de la croissance des installations sur la même période.
LA CHINE, PREMIER PAYS NEUTRE EN ÉMISSIONS CARBONE ?
Il semble que la Chine ait clairement choisi de se tourner vers les énergies renouvelables. Selon l’AIE, le pays a désormais 6 ans d’avance sur son plan de décarbonation et a déjà atteint ses objectifs de 2030. Le pays a ainsi installé en 2023 autant de panneaux solaires que le monde entier, Chine incluse, en 2022. Et pourtant, en 2024, les capacités solaires installées dans le pays ont encore progressé d’environ 30 % selon Bloomberg New Energy Finance. Côté mobilité, en septembre 2024, la Chine représentait 75 % des véhicules électriques vendus sur le mois. Le pays est aujourd’hui le premier marché en volume. Enfin, dans le domaine du nucléaire, la Chine a démarré cette année la construction de 11 nouveaux réacteurs et semble en ligne avec son objectif d’ajouter 150 centrales nucléaires à son parc d’ici 2035 !
Il semble que le gouvernement de Xi Jinping ait basculé et ait aujourd’hui un objectif clair : en accélérant le déploiement de son système énergétique bas-carbone, il s’affranchit de ses besoins en énergies fossiles, et donc de sa dépendance à des pays tiers. Le pays semble ainsi voir la transition comme un moyen d’assurer sa souveraineté. D’autant qu’il a sécurisé depuis maintenant plusieurs décennies son approvisionnement en métaux, grâce à des prises de participations et à des partenariats avec un certain nombre de gouvernements.
La Chine est bien engagée sur la voie de la transition énergétique - qui se passe pour l’heure principalement là-bas - et ne devrait pas faiblir, bien au contraire. Un ralentissement aux États-Unis devrait rester sans conséquence importante sur la demande de métaux. Rappelons que la Chine consomme aujourd’hui environ 50 % des métaux de la planète !
L’OR
L’ascension de l’or avec le soutien de la chine et des banques centrales
L’or a été soumis à des forces contradictoires en 2024. Le retard pris par les mesures d’assouplissement des politiques monétaires par les grandes Banques Centrales occidentales a ainsi pesé sur le cours du métal jaune. L’or n’ayant pas de rendement, son cours évolue plutôt à la baisse lorsque les taux réels augmentent. Les investisseurs occidentaux ont donc eu tendance à alléger leurs positions sur le précieux métal, ce qui s’est notamment vu dans la baisse des détentions d’ETF.
Pourtant le cours de l’or a, mieux que résisté, continué sa progression même dans cette période. Il a reçu pour cela deux soutiens de poids. D’abord celui des investisseurs asiatiques, et notamment chinois. Les actions et l’immobilier chinois étant tous deux très mal orientés en début d’année, les épargnants ont augmenté leur allocation aux valeurs considérées comme refuge, notamment l’or. Les détentions d’ETF en Asie ont ainsi progressé et soutenu les cours.
L’autre soutien de taille a été celui des Banques Centrales. Ces établissements ont poursuivi leur stratégie d’achat d’or entamée maintenant depuis plusieurs années. Après plusieurs années record, les Banques Centrales ont poursuivi sur leur lancée, réalisant ainsi leur meilleur premier trimestre en termes d’achats depuis plus de 20 ans. La tendance s’est poursuivie par la suite, même si elle a un peu ralenti par rapport aux années précédentes. Des questions se posent néanmoins sur la réalité des achats de la Banque Centrale chinoise, plusieurs analystes (dont Goldman Sachs) ayant fait remarquer que l’analyse des chiffres des douanes laisse penser que l’établissement aurait pu acheter bien plus d’or que déclaré…
En deuxième partie d’année, les actions chinoises sont reparties à la hausse, mais les investisseurs ont, pour l’essentiel, conservé leurs positions sur l’or. De leur côté, les investisseurs occidentaux sont revenus à l’achat avec le lancement du cycle de baisses de taux par les Banques Centrales américaine et européenne.
L’Inde a également redonné un peu de souffle à la hausse, avec sa décision à la fin de l’été d’abaisser les taxes à l’importation sur l’or et l’argent. C’est un vrai changement pour le pays, qui depuis 2012 avait tout fait pour limiter les importations du métal jaune.
Les tensions géopolitiques, notamment au Moyen-Orient, continuent également de constituer un soutien. Mais l’élection de Donald Trump a marqué un coup d’arrêt à la hausse, cet événement ayant renforcé le dollar et entraîné une révision à la baisse du programme de baisse des taux outre-Atlantique.
Un autre élément est venu soutenir le cours des métaux précieux et pourrait perdurer en 2025. C’est l’inquiétude quant au niveau des déficits publics aux États-Unis et dans d’autres pays, dans un contexte où le niveau d’endettement des grandes puissances économiques est sur des niveaux très élevés. Les intérêts sur la dette américaine ont ainsi dépassé cette année les 1 000 milliards de dollars, soit plus de 4 % du PIB américain 2023. De plus en plus de voix s’élèvent pour dire que cette tendance est insoutenable.
Les Banques Centrales devraient également continuer de soutenir le cours de l’or. Selon leurs déclarations lors d’un sondage publié en milieu d’année 2024, 29 % d’entre elles envisageaient en effet de poursuivre leurs achats dans les 12 prochains mois.
Enfin, les craintes de voir les mesures économiques de Donald Trump renforcer l’inflation et freiner le commerce international sont des éléments de nature à pousser les investisseurs à conserver une exposition à l’or. Ainsi, même si le cycle de baisse de taux pourrait ralentir aux États-Unis, les taux réels pourraient eux être orientés à la baisse. Ceci constitue un vrai soutien à l’or, qui pourrait poursuivre sa hausse et potentiellement toucher le niveau des 3 000 dollars l’once.
Un élément pourrait peser sur le cours du métal jaune : la possible intervention de Donald Trump pour mettre fin à la guerre en Ukraine. La réduction des tensions politiques en Europe pourrait ainsi pousser des investisseurs à alléger leurs positions défensives sur le métal jaune. Toutefois, les déclarations récentes du nouveau président américain sur le Groenland, le Canada et le Panama, ouvrent une période d’incertitude sur les relations internationales qui pourraient limiter cet effet.
L’ARGENT
L’argent bénéficie du développement des technologies bas-carbone.
L’argent a bénéficié du même contexte général que l’or pour sa composante précieuse. Il a néanmoins également été affecté par sa composante industrielle. La déception quant au soutien de la Chine à son économie a pesé sur le cours du métal, de même que l’élection américaine et son impact sur le dollar et les taux, mais globalement le marché de l’argent termine sur une croissance de son cours à deux chiffres en 2024*.
La demande a progressé de 1 % sur l’année selon le Silver Institute et 2024 devrait ainsi être la deuxième année la plus élevée de l’histoire en termes de consommation. Cette hausse s’explique principalement par le changement profond que ce marché connaît depuis quelques années. Métal qui conduit le mieux l’électricité, l’argent est en effet très utilisé dans les technologies bas-carbone, en particulier le solaire et la mobilité électrique. Les activités industrielles représentent ainsi désormais 55 % de la demande totale, avec notamment une croissance annualisée du photovoltaïque de 27 % depuis 2015 (source : Bloomberg BNEF, octobre 2024). La demande d’argent par cette industrie a ainsi progressé de 158 % entre 2019 et 2023 et devrait encore progresser de 20 % en 2024, selon le Silver Institute. L’accélération du développement de cette industrie est une partie de l’explication, mais c’est aussi l’évolution technologique qui explique cette progression. Depuis un peu plus d’un an, de nouvelles générations de panneaux solaires sont en effet sorties (ToPCon et hétérojonction) qui consomment plus d’argent par panneau, même si ceci est partiellement compensé par le meilleur rendement de ces nouveautés.
Les installations de panneaux solaires devraient poursuivre leur croissance en 2025, toujours tirées essentiellement par la Chine, même si le rythme devrait être moins soutenu que ces dernières années. Le marché du véhicule électrique a également vu sa consommation progresser cette année. Même si le marché européen a ralenti en raison de l’arrêt des aides à l’achat dans plusieurs pays (Allemagne notamment), le marché chinois a continué de progresser fortement (+40 %, source : Le Monde, 14 janvier 2025), de même que le marché américain (+9 % aux États-Unis et au Canada). Au total, le marché mondial a progressé de 25 %.
Avec l’entrée en vigueur de normes environnementales supplémentaires en Europe en 2025, le développement de la voiture électrique devrait reprendre, les constructeurs ayant besoin d’augmenter leurs volumes de véhicules bas-carbone s’ils ne veulent pas être obligés d’acquérir des crédits carbone pour des montants très conséquents. Nous évoquons notamment l’arrivée des véhicules à bas coûts des marques chinoises dans lesquelles des groupes européens ont pris des participations (comme le chinois Leapmotor**, dans lequel Stellantis** a pris la majorité du capital).
Côté production, les contraintes sont importantes. La production n’a quasiment pas évolué depuis 2014 et devrait s’établir en baisse de 1 % en 2024 selon le Silver Institute. La demande continuant de progresser, les stocks du précieux métal ont sensiblement baissé. D’autant que 2024 était la quatrième année consécutive où ce marché connaissait un déficit.
Offre minière contrainte, stocks en baisse et demande industrielle qui devrait poursuivre sa progression : tous les ingrédients sont réunis pour que l’argent poursuive sa progression en 2025. Une hausse de l’ordre de 20 %, portant les cours entre 36 et 38 dollars, semble tout à fait plausible.
** Les sociétés citées ne le sont qu’à titre d’information. Il ne s’agit ni d’une offre de vente, ni d’une sollicitation d’achat de titres.
LES PLATINOÏDES
Le platine et le paladium souffrent du déclin de l’industrie automobile thermique.
Les platinoïdes ont connu une nouvelle année difficile en 2024. Essentiellement utilisés dans l’industrie automobile thermique pour la fabrication de pots catalytiques, le platine et le palladium ont souffert du manque de dynamisme de l’industrie. Ils ont néanmoins rebondi devant le ralentissement des ventes de véhicules électriques en Europe.
Mais c’est surtout côté production que les investisseurs ont été déçus. Après la forte baisse des cours en 2023, nombreux étaient ceux qui misaient sur une contraction de l’activité minière sur ces deux métaux. Mais les groupes miniers ont préféré se focaliser sur la réduction des coûts et maintenir leur production. Toutefois, la situation a un peu changé en fin d’année, plusieurs d’entre eux annonçant, notamment en Afrique du Sud et aux États-Unis, être désormais obligés d’envisager la fermeture de certains sites.
Sur le platine, la croissance de la demande dans les autres industries que l’automobile (engrais, disques durs, électronique, miroiterie…) et dans la bijouterie, combinée à la réduction de la production, devrait entraîner le marché en situation de déficit. Celui-ci pourrait atteindre 30 tonnes, sur un marché d’environ 250 tonnes. Le marché pourrait donc progresser et repasser la barre des 1 000 dollars l’once, pour potentiellement atteindre les 1 100 dollars l’once dans le cours de l’année.
Une inconnue de nature à pousser le prix de ce métal davantage à la hausse est le développement de l’industrie de la production d’hydrogène par électrolyse et de son utilisation comme moyen de stockage de longue durée pour l’énergie renouvelable. Les électrolyseurs et les piles à combustible (machine permettant de retransformer l’hydrogène en électricité) sont en effet des gros consommateurs de platine. Pour l’heure, ce marché n’arrive pas à décoller. Mais la multiplication des périodes de prix négatifs de l’électricité, notamment en Europe, pourrait inciter les gouvernements à accentuer les aides sur ce secteur et l’aider à se développer.
Le palladium, ne profitant que de la réduction attendue de la production, mais devant lutter avec le recul des motorisations thermiques qui représentent l’essentiel de sa demande, ne devrait que peu progresser cette année. Les prix pourraient retrouver les niveaux de 950 à 1 000 dollars l’once, mais il est difficile d’espérer mieux.
LE CUIVRE
Le marché du cuivre devrait basculer dans une situation de déficit chronique de l’offre.
Le cuivre a connu une année 2024 agitée. Très utilisé dans les technologies bas-carbone, il est également au coeur des industries plus traditionnelles. Ainsi, le ralentissement du secteur immobilier et de la consommation en Chine, qui absorbe à elle seule environ 50 % du métal, a pesé sur les cours.
Néanmoins, l’accélération de la transition énergétique dans le pays, et la volonté du gouvernement de moderniser son réseau électrique, a permis une fois encore en 2024 à la demande de progresser dans le pays. Nous constatons ainsi une décorrélation de plus en plus forte entre la demande de ce métal et la croissance des secteurs industriels « traditionnels » (consommation de biens courants, immobilier…). Toutefois, il est à noter qu’à la fin de l’année 2024, seul le secteur immobilier affichait encore une croissance négative de la demande, les 5 autres secteurs (transport, réseaux électriques, biens de consommation, climatisation et produits électroniques) étant tous en progression depuis le mois de mars. Ceci a entraîné, cette année encore une hausse de la consommation dans le pays.
Du côté de l’offre, le marché est resté bien approvisionné en 2024. Pourtant, la production de métal brut était sous contrainte, après notamment la fermeture de la mine de Cobre Panama fin 2023. La tension s’est matérialisée au travers des marges de raffinages (TC/ RC). Le manque de matériau brut a obligé les raffineurs à accepter des marges négatives pour maintenir leur activité. Toutefois, ceci ne s’est pas ressenti dans les prix du cuivre sur les marchés. La raison en est qu’une grande partie du raffinage est réalisé dans le cadre de contrats long terme, renégociés tous les ans. Sur cette partie de l’activité, la marge négociée était encore de l’ordre de 80 dollars la tonne. Compte tenu du niveau négatif des marges sur le marché, les raffineurs ont profité de ces contrats pour traiter un maximum de cuivre avant la renégociation des contrats long terme en fin d’année. Cela a permis au marché de rester bien approvisionné à court terme.
Mais en fin d’année, les renégociations ont bien eu lieu, et certains gros contrats dont le prix a été révélé, ont été signés sur des niveaux de 21 dollars la tonne. L’incitation à transformer le métal sera donc bien plus faible dès le début de cette année, la majorité des raffineurs étant déficitaires sur ces niveaux. Cela devrait fortement limiter le flux de cuivre raffiné sur le marché.
En 2025, le développement de la voiture électrique, qui consomme 4 fois plus de cuivre qu’une voiture thermique, du photovoltaïque et des capacités éoliennes (qui devraient progresser respectivement de 15 % et 60 % selon Bank of America) devrait ainsi soutenir la consommation du métal rouge. La décision du gouvernement chinois de reconduire ses investissements dans son réseau électrique est également importante, d’autant que celui-ci vient d’annoncer qu’il y consacrerait environ 10 % de plus que l’an passé (89 milliards de dollars contre 80 en 2024).
Les annonces du gouvernement chinois de mesures pour soutenir la consommation et stabiliser le marché immobilier devraient également soutenir la consommation.
Côté production, les dernières annonces des groupes miniers sont prudentes. Les prévisions publiées dernièrement par Ivanhoe Mines* étaient environ 5 % inférieures aux annonces précédentes, et First Quantum* s’est également montré prudent. Au niveau national, la production du Pérou (2e producteur mondial) était en recul de 1,4 % en octobre et de 5,0 % en novembre. Dans le même temps le Chili, premier producteur mondial, a révisé ses prévisions de production à moyen terme à la baisse d’environ 14 % et prévoit un pic de sa production en 2027.
Des facteurs conjoncturels (absorption des stocks accumulés pendant la crise Covid en Chine, maximisation des revenus des raffineurs grâce aux contrats long terme en 2024) ont retardé ce qui aux yeux de nombreux intervenants (AIE, Goldman Sachs, Macquarie…) semble inévitable : le marché du cuivre devrait basculer dans une situation de déficit chronique de l’offre. 2025 devrait être la première année de cette tendance longue. Il ne faut toutefois pas oublier que les marchés de métaux sont des marchés qui se valorisent au comptant. Aussi, même si un déficit s’aggravant d’année en année semble acté, la hausse des cours sera progressive. Le cours du cuivre pourrait ainsi néanmoins retrouver des niveaux proches de ses plus hauts, autour de 10 500 dollars la tonne.
LE ZINC
La production de zinc devrait repartir à la hausse.
Le cours du zinc a profité en 2024 de fortes tensions côté production comme du retard pris dans certains projets et des incidents sur des sites de production. La production a ainsi reculé ces trois dernières années. Cette période semble toucher à sa fin avec une hausse de la production attendue de la montée en puissance de la mine de Kipushi en République Démocratique du Congo, l’extension d’une mine en Afrique du Sud, l’amélioration de la teneur en minerai d’une mine péruvienne et le début des exportations de la mine d’Ozernoye (Russie) après plusieurs retards. La production pourrait ainsi progresser d’environ 5 % en 2025.
Mais la demande devrait également se reprendre, aussi bien en Europe, portée par la baisse des taux et le soutien qu’elle apporte aux activités du bâtiment, qu’aux États-Unis ou en Chine, grâce aux mesures de soutien à la consommation, et possiblement au secteur des infrastructures.
Tout ceci devrait modifier à la marge l’équilibre entre l’offre et la demande, qui devrait passer d’un léger déficit à un léger surplus. Mais la bonne dynamique générée par le reste du complexe des métaux, devrait permettre au prix du zinc de rester stable ou de progresser légèrement en 2025.
LE NICKEL
En surplus depuis plusieurs années, le marché du nickel peine à s’équilibrer.
Sur le marché du nickel, l’éléphant dans la pièce depuis maintenant quelques années porte un nom : l’Indonésie. Le pays est devenu le plus gros producteur du métal avec plus de 55 % de part de marché sur la production de nickel raffiné. Devant la faiblesse des prix, le gouvernement indonésien a évoqué la possibilité de limiter la capacité de production dans les prochains mois et indiqué s’attendre à une stabilisation des prix sur les niveaux actuels. Étant donné le poids de cet acteur sur le marché, ces prévisions ne doivent pas être prises à la légère.
Du fait de la croissance de la production indonésienne, le marché est en surplus depuis plusieurs années. Même si la demande continue de progresser, portée par une demande d’acier inoxydable toujours solide malgré le ralentissement du secteur immobilier, et une croissance des besoins pour le secteur des batteries pour véhicules électriques, le marché peine à s’équilibrer. Même si la croissance de la voiture électrique en Europe, zone géographique qui utilise le plus les batteries à base de nickel, ralentit, le durcissement des normes environnementales en 2025 pourrait inciter les constructeurs à fournir un effort sur ce segment. En Chine, la reconduction de la prime à la casse pourrait également soutenir le marché. Tout ceci devrait permettre de réduire un peu le surplus attendu cette année. Si les Indonésiens venaient à confirmer la réduction de l’offre, le marché pourrait revenir tout proche de l’équilibre.
Le potentiel d’appréciation du nickel reste donc limité pour cette année. Mais, à l’inverse, le risque de correction est relativement faible : les prix actuels sont nécessaires pour que le processus de production de nickel de qualité batteries soit rentable et que le marché sur ce segment soit correctement approvisionné.
L’ALUMINIUM
Une production contrainte et une consommation d’aluminium en hausse
L’aluminium est le fruit de la transformation de la bauxite en alumine, avant de subir différents procédés chimiques pour parvenir au produit fini. Le marché de l’alumine a vu ses prix atteindre des plus hauts historiques au dernier trimestre 2024, en raison de difficultés d’approvisionnements en bauxite en provenance de Guinée (l’un des plus gros producteurs) et en Chine. La conséquence a été une forte hausse des prix de cet intrant de la production d’aluminium, qui ne s’est pas entièrement répercutée sur le prix de l’aluminium, mettant à mal les marges des raffineurs. Aujourd’hui, avec un prix de l’aluminium de 2 600 dollars la tonne, près de 10 % de la production ne couvre pas ses frais. L’offre pourrait ainsi être contrainte.
Par ailleurs, la Chine, qui produit près de 60 % de l’aluminium dans le monde, est aujourd’hui tout proche du plafond de production, fixé à 45 millions de tonnes par le gouvernement pour des raisons de consommation d’énergie et de normes environnementales (la production d’aluminium émet énormément de Co2, en moyenne 18 tonnes par tonne de métal produite selon la Banque Mondiale). Ceci est important car ces dernières années la Chine était le producteur marginal, avec une croissance de la production autour de 4 % par an sur les 5 dernières années. Elle ne devrait plus être que de 0,5 % par an en 2025 et 2026.
De plus, en fin d’année, le gouvernement chinois a annoncé mettre fin au remboursement de taxes à l’exportation sur l’aluminium, ce qui devrait limiter la disponibilité de ce métal sur le marché international ou en renchérir le prix.
De son côté, la consommation a continué de progresser en 2024, notamment en Chine où tous les secteurs hormis le bâtiment ont progressé, mais aussi en Europe et en Amérique du Nord, grâce à une activité soutenue des secteurs de l’emballage et du matériel électrique. Si la croissance de la demande devrait ralentir en Chine, elle devrait néanmoins continuer de progresser, portée par les mêmes secteurs que l’année dernière. Le reste du monde devrait suivre la même tendance, avec en plus un impact positif du secteur de l’immobilier, qui devrait trouver un soutien dans la baisse des taux d’intérêt de ces derniers mois. Finalement, la demande mondiale pourrait, selon JP Morgan, progresser d’environ 2,5 %.
Une fois encore, avec une production contrainte et une consommation en hausse, le marché de l’aluminium devrait basculer en déficit en 2025, ce qui devrait soutenir les prix du métal. En fonction de l’impact de la guerre commerciale qui se profile, le métal pourrait s’apprécier de 5 % à 10 % en 2025.
CONCLUSION
Même si le contexte politique et commercial est compliqué, la mondialisation et la forte interdépendance, sur de nombreux secteurs, entre les États-Unis et la Chine font que Donald Trump pourrait être contraint de négocier. L’impact de son élection sur le commerce mondial pourrait dès lors être limité.
Il en va de même de sa politique énergétique. La population américaine et les entreprises pétrolières elles-mêmes sont plutôt favorables à un maintien des politiques d’aides mises en place par l’administration de Joe Biden. Nous pourrions donc assister à une réorientation des politiques de subventions plutôt qu’à une suppression pure et simple. En outre, les États- Unis ne sont pas le centre de gravité de la transition énergétique et une modération de la politique de soutien ne devrait pas affecter outre mesure la transformation du système énergétique amorcée au niveau mondial.
Tout ceci devrait plutôt créer un contexte favorable à la demande de métaux. La demande étant - elle aussi - de plus en plus contrainte sur plusieurs métaux non ferreux, les hausses de prix pourraient être importantes dès cette année.
Toutefois, le début d’année pourrait être agité : le marché chinois connaît toujours un creux au moment du Nouvel an chinois (le 29 janvier cette année) et pendant la période de congés qui suit, et l’arrivée de Donald Trump au pouvoir devrait également rendre les acteurs nerveux. La tendance devrait s’amorcer à compter du deuxième trimestre, avant d’accélérer dans la seconde partie d’année. Le cuivre, l’aluminium et l’argent pourraient être les plus gros bénéficiaires de l’amélioration de la situation économique, et l’or pourrait profiter des inquiétudes sur la dette et l’instabilité politique.
Achevé de rédiger le 28/01/2025
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