PAROLE D’EXPERT

ACTIONS AMÉRICAINES

Quelles perspectives pour les actions américaines ?

Communication publicitaire
Frédéric TASSIN, Gérant actions Japon chez Ofi Invest Asset Management
Frédéric TASSIN
Directeur de la gestion actions globales et thématiques
OFI INVEST ASSET MANAGEMENT
2024 est en passe de se terminer sur un bilan très positif tant pour l’économie que pour les marchés actions américains. Frédéric Tassin, Directeur de la Gestion Actions globales et thématiques chez Ofi Invest Asset Management, partage son analyse des risques et des opportunités de ces marchés à quelques semaines du retour de Donald Trump et des Républicains à la tête des États-Unis.
Pouvons-nous déjà dresser un premier bilan de 2024 pour les marchés américains ?

Oui et ce bilan peut déjà être qualifié d’exceptionnel sur le plan économique. Il y a un an, nombreux étaient les économistes à juger improbable la perspective d’un ralentissement en douceur de l’activité économique. Force est de constater, désormais, que le président de la Réserve fédérale américaine (Fed), Jerome Powell, est en passe de réussir un atterrissage presque parfait de l'économie nord-américaine qui n’a eu de cesse de nous surprendre par sa vigueur au cours des derniers mois. En cette fin d’année, les indicateurs continuent encore à évoluer au-dessus des attentes.

Exceptionnelle aussi, mais d’une manière plus préoccupante, l’analyse de la composition de cette dynamique économique. Globalement, la résistance de la conjoncture s’appuie principalement sur la consommation des ménages. Mais cette consommation masque de très fortes disparités car elle est particulièrement concentrée sur les ménages les plus riches. À l’inverse, les ménages défavorisés éprouvent des difficultés croissantes à boucler leurs fins de mois. Cette situation s’observe dans des récents messages délivrés par les entreprises de grande distribution à l’image de Walmart(1) qui constate depuis un an que les consommateurs ont tendance à privilégier les produits d’entrée de gamme. Parallèlement, le taux de défaut des crédits à la consommation progresse nettement depuis 18 mois, sur une pente comparable à celle de 2008.
Une année exceptionnelle enfin dans la dichotomie qui touche l’investissement des entreprises. À première vue, les chiffres sont solides, avec une hausse sensible en 2024. Mais si l’on exclut le secteur technologique, en particulier les entreprises liées à l’Intelligence Artificielle, l’investissement est en quasi-stagnation.

Quels ont été les thèmes dominants des marchés depuis le début de l’année ?

L'intelligence Artificielle et les taux d'intérêt. Ce sont les « Magnificent Seven »(2) qui ont tiré la croissance des indices. Ces entreprises du secteur technologique ont en effet tiré la croissance des bénéfices des indices au premier semestre, alors que les résultats sont restés stables, en moyenne, pour les autres secteurs. Au total, les « Sept Magnifiques » expliquent plus de 50 % de la progression du S&P 500 au cours du premier semestre 2024. Le mouvement s’est un peu rééquilibré depuis, mais l’écart reste encore considérable entre valeurs technologiques et valeurs dites traditionnelles, qui continuent de souffrir de la fragilité de la consommation des ménages les moins aisés et des incertitudes relatives aux mouvements de taux d’intérêt. Ces mouvements ont également influencé les fluctuations de marché. Les taux d’intérêt jouent en effet un rôle majeur dans l’économie réelle.
Les taux d’intérêt influencent directement les décisions d’investissement des entreprises, notamment dans les secteurs industriels. Face à un consensus très baissier sur les taux d’intérêt depuis le début de l’année 2024, de nombreuses entreprises ont repoussé leurs projets d’investissement en attendant une baisse du loyer de l’argent, finalement intervenue en septembre. En conséquence, une bonne partie des dépenses d’investissement a été décalée à la fin de l’année, à mesure que la perspective de cette baisse, finalement intervenue en septembre, s’affinait.

Fort de ce constat ambivalent avec une situation économique plus solide que nous ne le craignions mais source de fragilité, quelles perspectives pouvons-nous entrevoir ?

En matière d’investissement, nous pouvons probablement attendre une amélioration. Maintenant que la baisse des taux est enclenchée par la Fed et si nous prenons en compte le fait que les entreprises affichent des bilans sains et disposent de cash-flows solides, elles vont probablement relancer leurs investissements, avec un an de retard sur le calendrier prévu.
La question clé, pour les marchés, sera l’évolution des résultats des entreprises. Pour 2024, le consensus attendait une hausse de 10 % des bénéfices. Pour le moment, nous en sommes à 8 %, ce qui rend cet objectif atteignable. Mais le consensus envisage une progression de 15 % en 2025 ce qui ressemble tout de même à un défi. D’abord parce que la progression actuelle des bénéfices est essentiellement due, une fois de plus, aux entreprises du secteur de l’Intelligence Articielle pour lesquelles il va devenir, de plus en plus difficile de garder le rythme au cours des prochains trimestres. Il faudra donc que l'économie traditionnelle prenne le relais. Et de l’autre côté du spectre, nous constatons une absence de reprise de momentum dans la croissance des résultats, les secteurs traditionnels semblant plus à la peine.
Cela doit nous inciter à privilégier en priorité les entreprises capables d’avoir ce que nous appelons du « pricing power »(3), c’est-à-dire qui peuvent protéger leurs marges en maintenant des prix élevés quelles que soient les conditions économiques. Autrement dit les leaders sur leurs marchés et les entreprises bénéficiant d’une position oligopolistique.

Les élections américaines vont-elles rebattre les cartes ?

La victoire de Donald Trump, et au-delà, la victoire du camp Républicain américain qui va désormais truster la Présidence, la Chambre des représentants et le Sénat, permet aux marchés actions de s’éviter les incertitudes liées à une longue phase de contestations en tout genre et à un blocage de l’économie. La réaction à la hausse des marchés américains dès la publication officielle des résultats en témoigne. Évidemment, il est encore trop tôt pour se prononcer sur l’impact réel du nouveau pouvoir car il faudra attendre de savoir si les actes seront conformes aux paroles et aux promesses électorales.
Le programme du candidat républicain, ainsi que le profil des premières nominations annoncées pour l’implémenter, devraient avoir un impact pro-croissance américaine mais avec un risque inflationniste. En outre, le mandat « Trump 2 » semble vouloir être rapidement opérationnel, expérience oblige, à la différence de « Trump 1 » dont le démarrage avait été, pour le moins, chaotique. Rappelons toutefois, qu’au-delà des annonces emblématiques, l’ensemble des mesures devront être négociées et votées, les résultats ne seront donc sûrement pas aussi binaires que promis.
Concrètement, les annonces de baisses d’impôts et de dérégulations créent un cadre « pro business » et de la visibilité, au moins jusqu’aux élections de mi-mandat (Mid-Term), pour « Corporate america »(4) qui devrait soutenir l’investissement et la croissance aux États-Unis dans un premier temps. Les hausses de droits de douane ainsi que les lois sur l’immigration, sans doute difficilement applicables en l’état, devraient apporter un surcroît d’inflation dans un premier temps mais pourraient peser sur la croissance à plus longue échéance.
Même si les élections américaines étaient le point d’orgue de cet automne, n’oublions pas que ces dernières semaines ont été l’occasion des publications d’un nombre important des résultats trimestriels des entreprises. Aux États-Unis, si les annonces restent globalement de bonne facture, nous aurions tout de même souhaité avoir un peu plus de bonnes surprises au niveau des évolutions de chiffres d’affaires. L’attentisme semble avoir dominé le comportement des agents économiques américains dans cette période pré-électorale. Les ménages sont toujours peu enclins à déclencher de grosses dépenses dans un contexte de taux d’intérêt toujours aussi élevés. Et les entreprises semblent avoir également fait preuve de prudence face à une incertitude politique extrêmement élevée.
Maintenant que la vague rouge républicaine vient de tout rafler sur son passage, il n’est pas improbable que nous assistions à un rebond de l’activité à court terme, le résultat des élections ayant permis de balayer une partie des incertitudes, au moins politiques.
Nous relevons donc tactiquement d’un cran notre positionnement sur les actions américaines en cette fin d’année(5). La croissance des résultats des entreprises américaines est attendue à +10 % en 2024, et à près de 15 % en 2025. Les futures annonces du nouveau gouvernement en janvier permettront de savoir si cet objectif sera plus ou moins facile à atteindre. Et de donner une première tendance sur l’évolution des marchés pour 2025.
Le risque géopolitique, occulté par les marchés financiers jusqu’à présent que ce soit en Europe, au Proche-Orient et même à Taïwan, pourrait toutefois entraîner des conséquences non négligeables sur le secteur des semi-conducteurs et sur celui de l’Intelligence Artificielle. Pour toutes ces raisons, nous anticipons pour le semestre à venir une hausse modérée des marchés actions dans leur ensemble, plutôt à un chiffre, Dans cette optique, il nous semble judicieux de profiter des creux de marchés pour se renforcer.

Achevé de rédiger le 04/12/2024

RÉFÉRENCES
(1) Les sociétés citées ne le sont qu’à titre d’information. Il ne s’agit ni d’une offre de vente, ni d’une sollicitation d’achat de titres.
(2) L'expression les « Sept Magnifiques » ou « Magnificent Seven » a succédé aux GAFAM (Google, Amazon, Facebook, Microsoft) au début 2023. Elle fait référence à sept entreprises américaines, leaders dans leur domaine et qui ont réalisé un parcours boursier exceptionnel. Par ordre alphabétique, ce groupe compte : Alphabet (la maison mère de Google), Amazon, Apple, Meta (anciennement Facebook), Microsoft, Nvidia et Tesla.
(3) Désigne la capacité de certaines entreprises à augmenter leurs prix sans perdre de clients et sans faire chuter leurs ventes.
(4) Les entreprises américaines.
(5) Nos vues sur les classes d’actifs fournissent un cadre de discussion large et prospectif qui sert de guide aux discussions entre les équipes d’investissement d’Ofi Invest Asset Management. L’horizon d’investissement de ces vues est à court terme et peut évoluer à tout moment. Ce cadre ne constitue donc pas une indication pour construire une allocation d’actifs de long terme.
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